Domicile
les albatros sont des oiseaux Ă©tranges
demeurant dans le monde
et pourtant nulle part
chez eux
que savez-vous des limbes que leurs ailes traversent
et des cicatrices intangibles que leurs vols
tracent à l’envers du ciel
leurs rémiges ne connaissent qu’une frontière
celle des horizons cardinaux
orée du visible
et de l’invisible
du palpable et de l’impalpable
et des sabliers fous
leurs plumes n’ont de repos
qu’en l’aubier d’Eole
quand il hésite
entre la harpe et le harpon
comment les comprendre
dans vos rues limitées
et le vase clos
de vos jardinets
quand vos yeux se ferment
il fait nuit
derrière vos paupières
et vous croyez que le jour s’est enfui
mais la lumière n’a jamais choisi
ce qu’elle voulait éclairer
ni le vent le sens
qui va le diriger
laissez voler les albatros
à l’errance de leur envergure
dans les aubes lisses et linéaires
et s’ils viennent se poser
silencieux et altiers
c’est que le seul pays
qu’ils désirent habiter
est l’espace de vos bras
en toute liberté
Anne-Laure Lovis